(Chat de banlieue, à l’heure de la vaisselle)
Lorsque vous commencez à vous intéresser à vos « semblables » (ce qui peut vous tomber dessus à n’importe quel âge), vous êtes fatalement conduit à les questionner sur leurs souvenirs (« Dites, c’était comment, il y a cinquante ans? ») et à confronter leurs expériences à la vôtre.
C’est dans cette intention que je suis allé visiter récemment l’un de mes voisins, avec qui j’ai eu cet échange singulièrement enrichissant.
« Dites-moi, Père François, vous avez bien eu un chat quand vous étiez jeune? »
« Ah oui, dame… »
« Il s’appelait comment? »
« Rocco. »
« Il était Italien? »
« Non, mais il avait des frères. »
« Je vois. Et vous l’avez eu très petit, je crois. »
« Minuscule. Il avait tout juste quelques jours. »
« Et qu’est-ce qui s’est passé le lendemain de son arrivée chez vous? »
« Il a disparu. »
« Comment ça? Il s’est échappé? »
« Non, j’ai cru qu’il s’était échappé. En fait, il s’était caché derrière le frigo. »
« Ça alors! »
« Vous savez, c’est farceur, un chat. De mon temps, en tout cas. »
Un long silence s’installe. Nous savourons et méditons ce qui vient d’être dit. Une heure plus tard, je prends discrètement congé, laissant le Père François à ses merveilleux souvenirs.
Les vieilles gens ont tant à nous apprendre.
O. E.