(A. : Alfred Eibel ; C : Claire Garsault ; O : Olivier Eyquem)
VOIX, CHANTS ET MUSIQUES
O : Je me souviens des appels du vitrier, du charbonnier et du rémouleur.
O : Je me souviens d’une émission de gym matinale des années cinquante (« Le Réveil en musique »?), tellement dynamique qu’elle donnait envie de regagner son lit.
O : Je me souviens de la voix grave et solennelle de Jean Toscane, annonceur des soirées musicales du dimanche.
C : Je me souviens du calme et du bien-être ressenti en écoutant Vivaldi, Boccherini, Allegrini, Corelli, Scarlatti et quelques autres en « I », tout en travaillant, lisant ou tissant.
O : Je me souviens du disque – un enregistrement de la musique de CITIZEN KANE – qui me fit découvrir une chanteuse inconnue que j’imaginais alors être japonaise : Kiri Te Kanawa…
SAVEURS ET PARFUMS
O : Je me souviens d’un parfum douçâtre, humé trois ou quatre fois à des années de distance, dans les lieux les plus divers, et dont je n’ai jamais su identifier la nature.
O : Je me souviens de mon arrière-grand-père landais, du béret maculé qu’il gardait vissé sur la tête et du fumet que dégageait sa personne entre ses deux toilettes mensuelles.
O : Je me souviens de l’odeur enivrante de la bouse de vache, un des multiples plaisirs que dispense la montagne.
INSOLITES (LOST IN TRANSLATION)
A : Je me souviens, à Bruxelles, chaussée de Vleurgat, d’un épicier affichant « Ici Pain de Pisse ».
A : Je me souviens d’un garçon de café de Charleroi de demandant quelle sorte d’eau minérale je désirais : « Avec ou sans vagues? ».
O : Je me souviens d’une « Hütte » (refuge alpin, en Suisse allémanique), qui proposait de succulentes soupes paysannes fort épaisses, en deux versions : « Mit oder Ohne » – Avec ou Sans (saucisse).
A : Je me souviens d’un richissime Américain filant sur le Léman dans son yacht privé en compagnie de plusieurs jolies filles, et lançant en français, avec un accent à couper au couteau : « On va bien se marrer! »
O : Je me souviens d’un autre Américain (mais peut-être était-ce le même), débarquant en pleine brume à la gare de Zermatt et protestant vigoureusement : « Where the hell is the Matterhorn? ».
A : Je me souviens de Fritz Lang à l’aéroport Charles de Gaulle fort en colère parce qu’on ne s’occupait pas assez vite de lui, et clamant sur tous les tons : « Je suis membre du Clipper Club! »
MAUVAISE ÉDUCATION
A : Je me souviens d’un curé qui n’arrêtait pas de se curer les narines en célébrant la messe.
A : Je me souviens d’un homme d’affaires fort corpulent, vivant dans le village de Mies (Canton de Vaud), qui exigea du chef de gare d’arrêter l’express Genève-Zurich afin qu’il puisse y monter.
A : Je me souviens des dernières paroles de cet officier qui exigea de la garde-barrière de le laisser passer en hurlant « Je suis le colonel Aboud », quelques secondes avant d’être réduit en bouillie par le passage de l’express Genève-Zurich
A : Je me souviens d’un libraire, vendeur d’ouvrages d’occasion, disant à un Africain venu lui proposer un lot : « Où avez-vous volé ces livres, vous qui ne savez ni lire ni écrire? »
A : Je me souviens d’un responsable d’édition spécialisé dans la vente à domicile dire à un candidat « de couleur » : « Désolé, je ne peux vous confier ce travail, vous risqueriez de faire peur à la clientèle. »
A : Je me souviens d’un chauffeur de taxi qui, apercevant un Noir bien vêtu accompagné d’un enfant bien habillé, et me faisant observer : « Vous vous rendez compte, Monsieur, hier, il courait encore pieds nus dans la forêt vierge, et aujourd’hui, il ne sait même pas qu’il a un pantalon. »
HUMOUR
O : Je me souviens du « 22 à Asnières », du « Hallebardier », du rituel « Bourreaux d’enfants! » qui ponctuait certains sketches de Fernand Raynaud, et que la salle hilare reprenait en chœur.
A : Je me souviens d’un ami, allergique à la race canine, qui chaque fois qu’il apercevait une dame promenant son chien, se mettait à quatre pattes et aboyait.
A : Je me souviens, adolescent, m’être introduit avec un copain chez un antiquaire, et avoir pris place dans un fauteuil Louis XV avant de lancer au marchand : « Deux cafés serrés, s’il vous plaît! »
O : Je me souviens d’un atroce calembour (ce sont évidemment les meilleurs) durant un feuilleton radio comique : un espion russe, accent à l’appui, clamant : « Nous nous battrons, car la lutte est russe! »
O : Je me souviens de la blague dite du « tirailleur sénégalais » : Dans une allée obscure, une tapineuse hèle un passant : « Tu viens, beau blond? », qui lui répond : « ça y en a pas être beau blond, ça y en a être tirailleur sénégalais » (Eh oui, ça y en a faire rire les bons Français en ces temps lointains.)
ETC., ETC.